La vieille du deuxième avec sa voix chevrotante va encore me dire de baisser la musique. En pleine journée. Alors que les gamins qu’elle garde hurlent du matin au soir. Elle va me dire que si ça me dérange c’est parce que je n’ai pas un rythme de vie normal. Parce que je me couche tard, si tard qu’elle a le temps de se lever avant de me voir rendre les armes à Orphée. Elle va me dire que c’est un truc de dégénéré, que la nuit c’est pour dormir. Que tout le monde fait comme ça depuis toujours. Que c’est logique. Elle comprendra jamais rien à rien. Elle verra mes cernes. Elle se dira c’est pas possible un truc comme ça. Je suis sûre qu’ils carburent à la drogue dans cet appartement là. J’ai vu tant d’hommes passer. Ils parlent avec passion jusqu’à l’aurore. Qu’est ce qui peut être assez important pour les tenir éveillés ? C’est forcément à cause des cachets ou des piquouzes, ça peut pas être autrement. Personne ne peut parler autant.
La vieille observe. Elle me regarde de la tête aux pieds, comme si le mystère de ma condition était visible à l’œil nu. Elle jauge. Je crois qu’elle a oublié tout ce qui faisait d’elle une femme. Si je lui parle de l’écriture. Des hommes-pieux. Des strates temporelles et géographiques qui se mélangent sur ma peau, dans mon crâne. Si je lui dis moi viens, assied-toi, je te sers un café on va parler. Si je lui dis l’été et la douleur. Si je lui dis les mots. C’est sûr, elle va clamser.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire