Cet amour-là

"Elle dit: non, ne pleurez pas, ce n'est pas triste, en rien, en aucun cas. Il s'agit de vous et de pas vous, oubliez votre personne, ça n'a aucune importance. Il ne faut pas se prendre pour un héros. Vous êtes rien. C'est ce qui me plaît. Restez comme ça. Ne changez pas. Restez. On va lire ensemble."

Yann Andréa

Dachau*

Chaleur étouffante. Coagulation humaine. Pèlerinage conventionnel, obligatoire, devoir de mémoire. Découvrir ici, sous ce soleil cinglant, la réalité du passé, l’horreur. Panneaux indicateurs, œil en plastique noir pendu au cou, casque explicatif et tout le recueillement du monde.

Il était pas mal, le petit déjeuner de l’hôtel.

Imaginer les corps, imaginer les jeux de pouvoirs, solidarité et trahison. Il faut voir, entendre, comprendre. Ouvrir sa cage thoracique et imprimer des sensations durables, se révolter et faire en sorte que ça ne se reproduise jamais jamais jamais.

Tu n’aurais pas une bouteille d’eau dans ton sac ? Il faut des mouchoirs pour Mamie, elle pleure en répétant inlassablement la même phrase faite de « bébé dodu crochu, communiste ! », je crois que la visite ne lui fait pas de bien.

Baraques brillantes, reconstituées pour durer. Rendez-vous compte, tout avait été prévu ! Comment en serait-il autrement ? Cela dit, la police des panneaux est assez réussie, très art déco.

Nous on a déjà fait Auschwitz et Ouradour, on nous avait dit que Dachau était assez bien conservé et c’est vrai que c’est pas mal fait, la statue dans la cour est très bien mise en valeur. Mais on se contente pas de ces visites, voyez, on regarde aussi pas mal de films sur l’époque. Ce qui nous passionne, pardonnez-moi l'expression, c’est les trains. Le côté vide-plein-vide-plein, leur ballet incessant. Ça fait sortir le problème de la stricte circonférence barbelée, ça l’amène au cœur de nos histoires. Enfin, je ne vais pas vous embêter avec mes théories, c’est très subjectif comme vision. Il est bien votre appareil, dites-donc, ça fait vraiment pro. Vous l’avez payé cher ?

Le four, silence.

Papa, ça peut pas être un four, y a pas de résistances. Maman m’a dit que le danger du four, c’est les résistances, que ça brûle, fait des ampoules, la peau qui craquèle et la douleur. Ici, y en a pas. Tu me prêtes l’appareil photo ?

Les sandwichs au pain de mie, le papier alu qui craque, le beurre fondu et la salade ramollie. On aurait mieux fait d’acheter des pizzas, ils en font à côté de la boutique de souvenirs.

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