Elles sont par grappes, sur des rangées de velours rouge. Elles sont sorties sans leurs maris. Elles sont ravies. Le brouhaha des jeunes les insupporte. Le brouhaha des jeunes ne couvre pas leur caquètement aigu, haletant, parce qu'elles attendent.Elles attendent que lui, le vilain, le disgracieux, sorte des coulisses et glisse dans leurs oreilles, les faisant hurler comme des corneilles, râler comme des génisses, trembler comme des poules sans plumes. Oui, que lui, sorte des coulisses et glisse dans leurs oreilles. Leurs bouches s'ouvrent pour happer l'air qui leur manque. Elles sont chaudes et elles sont sèches. Elles ont des cheveux de paille et des dents d'or, elles attendent. Elles frémissent sur leurs derrières flétris. Elles attendent, ravies, de rêver au prince bad boy.Elles se serrent les coudes et se font des clins d'œils complices de femmes qui savent que de leur vie, il ne reste plus que ça: le rêve d'être autrui. Mais leur solidarité ouverte cache une évidence plus laide: elles s'arracheraient les tripes plutôt que de laisser leur place rêvée, leur place dorée, au paradis des chiffes grises et molles. Quand il arrive enfin, défoncé et malsain, elles se dressent sur leurs derrières, le cou en l'air, la narine frémissante et sortent enfin l'objet de leur désir: la boîte à rêves, la boîte à merde; l'écran de capture qui va révolutionner leur fond d'écran. Et, d'un coup d'un seul, elles sont simultanément debout sur leurs pattes tordues, les bras en l'air et le visage crispé: putain, mais arrêtez de bouger, je veux le mettre en boîte!
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