Cet amour-là

"Elle dit: non, ne pleurez pas, ce n'est pas triste, en rien, en aucun cas. Il s'agit de vous et de pas vous, oubliez votre personne, ça n'a aucune importance. Il ne faut pas se prendre pour un héros. Vous êtes rien. C'est ce qui me plaît. Restez comme ça. Ne changez pas. Restez. On va lire ensemble."

Yann Andréa

Vouivre

"l'enfant pleure et rit en même temps, tandis que l'adulte non." Marguerite Duras, les yeux verts

C'est intolérable pour elle tu vois. Intolérable. La vie j'entends. Elle boit, elle écrit, elle crie. C'est-à-dire qu'elle ne sait pas parler autrement qu'en criant, qu'en appuyant à fond sur les syllabes. En fabriquant des sons qui ne caressent pas. Qui crient. Qui se cabrent. Quand elle parle elle se cabre. Elle s'exprime comme elle peut: dans la douleur, depuis la douleur. Quand elle parle tu entends le crissement du stylo sur le papier, seul refuge, seul repère. Quand elle parle tu vois que le langage est fait pour être écrit dans sa vie. Qu'il ne dit pas grand chose autrement, qu'il est au bord du précipice quand elle parle. Celui de la folie.

Le vent pour elle c'est intolérable - ça attise les tripes le vent c'est pour ça, intolérable. Le vent c'est aussi quand les mots sont arrachés par les bourrasques, gobés, effacés. Un sale coup de balais sans considération, l'injustice du monde résumée à un élément. La mer en revanche, la mer. L'odeur, le son, la texture et le froid. Palpable dans sa langue, la mer. Caresse gigantesque, retour aux sources: paix. Couleur infinie, au plus près de la jointure impossible entre le plein total et le vide total. Comme la ligne d'horizon.

C'est pour ça sans la mer elle s'insurge, elle n'y peut rien.

Souvent d'ailleurs la Vouivre crache le feu.

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