Cet amour-là

"Elle dit: non, ne pleurez pas, ce n'est pas triste, en rien, en aucun cas. Il s'agit de vous et de pas vous, oubliez votre personne, ça n'a aucune importance. Il ne faut pas se prendre pour un héros. Vous êtes rien. C'est ce qui me plaît. Restez comme ça. Ne changez pas. Restez. On va lire ensemble."

Yann Andréa

Salomé

Shadows settle on the place, that you left. Our minds are troubled by the emptiness. Destroy the middle, it's a waste of time. From the perfect start to the finish line. 

Salomé maquillée, en fourrure. Des talons et le souffle qui fait de la fumée dans le froid devant la salle de concert. Salomé attend ses proches pour leur montrer que le lipstick et la beauté ça permet de régaler un peu tout le monde. Salomé attend. Salomé espère que tous ceux qu'elle a mis sur liste viendront et verront là sur la grande scène du music hall son amant qui les a invités grâce à son oeil à elle, grâce à ses dents et aux mille reflets dans ses cheveux quand elle les bouge. Salomé a poireauté une heure pour s'assurer qu'oncles et tantes, cousins, cousines, petits frères et grande soeur, tout le monde soit arrivé. Salomé à l'entrée elle bouscule pour montrer l'importance de sa personne. Je suis là oui c'est moi et là c'est ma famille et le music hall c'est comme ma maison puisque l'homme de mes nuits chante dans le micro. Quelques pellicules tombent dans les profondeurs de la fourrure noire. Trop peu nombreuses pour qu'on les voie vraiment. Elle se secoue.

Au fur et à mesure que les noms sont égrainés, les invitations se distribuent. La famille passe les contrôles et Salomé sourit. La crinière électrique. Les dents luisantes. Salomé donne son nom et puis Salomé grince. Rayée. Rayée de la liste d'invités tandis que la famille peut entrer. Scandale impossible, poussière venant gripper le rouage pourtant parfait d'une soirée qui devait la célébrer. Salomé et les yeux qui brillent, les lèvres qui viennent propulser des dents et une langue enragée. Pauvre liste et pauvres gens qui ruinent sa soirée comme ça. Le trait de stylo noir qui ne pardonne pas. Là, gras, en plein milieu de son nom, l'encre a bavé. Rayée. Rayée de la putain de liste, Salomé pourrait escalader toutes les barrières du monde pour étriper tous ces employés qui comprennent rien à ce qui qu'elle est devenue grâce à ce corps entretenu et à ce sourire parfait. Salomé pourrait les tuer là comme ça. Salomé veut taper un scandale tandis que dans la salle elle entend la musique qui étend son emprise sur le public. Salomé va chialer.

En face les gens sourient un peu gênés devant son attitude extrême. L'arrivée tardive, le bruit, la famille. Salomé qu'est encore plus belle quand elle crie. Salomé qui ne sait pas garder son calme et sa place dans les rangs. Salomé qu'ira loin ou qui s'explosera les dents fonction des gens qui mettent ou rayent son nom de listes. Salomé qui sait pas encore tout ça, à quel point son envol dépendra de ses rivales et de l'effet du rail de coke sur le mec qui la mettra sur la prochaine liste ou qui l'enlèvera. En attendant, Salomé dans son plein droit hurle sur le tapis rouge, reflétée dans les vitres des portes. Son noir et le rouge vif de son lipstick qui tiennent malgré la bave et les larmes. La famille qui n'en peut plus. Les cousins qui veulent voir la scène et la mère qui s'inquiète pour sa fille et qui croit que finalement elle l'a pas bien élevée, dressée. Salomé qui meurt là comme ça tandis que le trait noir ne bouge pas de son nom.


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