Cet amour-là

"Elle dit: non, ne pleurez pas, ce n'est pas triste, en rien, en aucun cas. Il s'agit de vous et de pas vous, oubliez votre personne, ça n'a aucune importance. Il ne faut pas se prendre pour un héros. Vous êtes rien. C'est ce qui me plaît. Restez comme ça. Ne changez pas. Restez. On va lire ensemble."

Yann Andréa

More ain't enough

"Je t'embrasse à m'y casser les dents." Gmail, le 16 mars 2013

"Loving you breaks my knees."

Elle avait dit ça dans cette langue-là et sans que ça s'inscrive en aucune façon dans la conversation. Elle avait souri. Le sourire le plus cruel et le plus enfantin qui soit. Elle était capable de ça: être naïve et puissante à la fois. Elle avait vu l'Enfer, elle en était revenue.

Meredith qu'elle s'appelait. Ou Eurydice, mais ça il aimait pas. Cette idée-là. Qu'un serpent lui lacère la chair et mette à jour le processus de putréfaction naturel de la chose. Que ce serpent soit en elle. A sommeiller en attendant le bon moment. Qu'il ne se manifeste jamais en sa présence à lui. Ou alors par fulgurances, histoire de le narguer. Méchamment. Parce qu'il savait très bien ce qui se passait dans ce corps. Il avait tout à fait compris cette connerie qu'on appelle les bleus et contre lesquels il ne pouvait rien. Tout ce qu'il savait c'était que le serpent était tellement puissant qu'il était impossible de le nommer ou d'énoncer le moindre des maux qu'il causait sans en même temps enfoncer les crocs vénéneux de la bête plus en avant dans la chair de sa belle. Que le silence et la patience étaient sa seule option et que cette option était avant tout une option de latence. De déni aussi. Mais que sans ça tout s'accélèrerait. Il fallait donc se taire. Caresser les nerfs.

Meredith. Meredith. Elle buvait du gin, elle dansait le blues, elle pleurait comme un enfant. Meredith aimait comme une femme, c'est ce qui le tenait lui. Quand elle dansait et quand elle aimait d'ailleurs, il voyait très nettement le degré de putréfaction. Et il savait qu'il devait s'en détourner, sans quoi elle disparaitrait. Il savait aussi qu'il ne pourrait pas éternellement. Les yeux gris comme l'avalanche. Qui pouvaient se perdre dans le néant, suspendus comme la poussière dont s'entourent toutes les avalanches. Les fantômes. Mais le gin et la vie et les sourires infinis. Cruels et naïfs. Authentiques.

Et puis aussi il savait sa crainte à elle. Son vertige. Son incapacité à faire un pas de côté. Alors, tout empli de son sentiment de responsabilité, il attendait ce qui immanquablement finirait par arriver.

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