Cet amour-là

"Elle dit: non, ne pleurez pas, ce n'est pas triste, en rien, en aucun cas. Il s'agit de vous et de pas vous, oubliez votre personne, ça n'a aucune importance. Il ne faut pas se prendre pour un héros. Vous êtes rien. C'est ce qui me plaît. Restez comme ça. Ne changez pas. Restez. On va lire ensemble."

Yann Andréa

Jimmy



Jimmy avec ses yeux noirs comme deux bonbons au réglisse qui tombent de ses orbites, suspendus au fil capricieux et fragile de leur vie. Jimmy dont maman dit qu'il est le troisième de sa lignée, que je devrais comprendre à mon âge. Jimmy l'éternel sauveur de mes nuits. Jimmy, sa peau est tellement rugueuse à l'usure que je ne connais rien de si doux. Jimmy pue, mais bien moins que papa. Jimmy ne dit pas non et Jimmy aime bien les lits chauds, les soupirs sur l'oreiller. Jimmy n'a jamais eu peur de la morve et des visages rougis. Jimmy qui se défigure pour n'être qu'à moi. Jimmy qui a toujours le mot qu'il faut, quand il faut. Jimmy qu'il faudra laisser, oublier, abandonner dans un carton pour qu'il y ait une chose, sur terre, qui pue plus que papa. Jimmy qui saura laisser la mousse dégueuler et la poussière tomber pour qu'on nous croit séparés. Jimmy qui croit tellement aux mots qu'il n'en a jamais prononcés. Jimmy qui habite les souvenirs qui devraient ne pas en être. Jimmy dont l'image remplace les verres brisés et les batailles perdues qui ont le goût de fin de guerres. Jimmy qui dit illusion perdue pour dénoncer la connerie humaine. Jimmy qui n'a jamais cru aux enfants sages et aux gestes préservés.


Jimmy, ma vie.

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