je voulais donc nous voulions, et entrée, elle. devant la
mer arrivée, un véhicule riche, neuf, qui avait roulé. nous étions arrivées à
la mer, elle était là et il était mort. les boutiques et les portes et les
perrons étaient, tenaient, une femme nous accueillait que nous payions. nous
lui donnions de l’argent, elle, des lits. elle, ses histoires, que nous
écoutions en compassion pour ne pas voir, ne pas dire, ce reste impossible de
lui et d’elle, troublées par le bruit, le ressac, l’odeur, les galets que nous
ne pouvions plus amener, ne pouvions plus faire polir, ne pouvions plus
transformer. savais-je peut-être déjà le phare reproduit aux premières pages d’un
livre. phare jusqu’alors inutile, ou normal, phare de station balnéaire devenu
figure, devenu phare, repère, depuis qu’un livre et qu’un auteur cheminant le
prenait pour départ, pour ancrage contre sa folie qui s’annonce là où pour nous
se terre. phare. les frites alors, le poisson, le vinaigre sombre, les
habitants, les vacanciers, n’appartenant jamais. la pauvre station dont ne
restait pour moi, dont n’existait que la poste banche et rouge pour y avoir
acheté, peut-être, un cerf-volant. la mer, pour n’y avoir jamais nagé. la mer
infinie et grise, jamais regardée, jamais goûtée. les canons, non pour les situer,
mais pour y grimper, l’image de mes jambes trop courtes étirée, doigts de pieds
tendus, en appui pour s’élancer, s’ouvrir, enfourcher. canons sans histoires, promontoires,
blancs, ou noirs, tandis que les potences sont blanches et que les drapeaux
claquent à l’horizon un peu éteint de la mer du nord et que l’ambre reste et
que l’herbe est verte, entretenue, ponctuée de bancs, de chemins asphaltés, de barrières.
toujours à la mer j’ai voulu aller, elle avait demandé, c’est ce que j’avais
trouvé : la mer, pour la mettre entre nous. forcément les canons les avoir
pensés, avoir entendu dans la tête l’explosion, avoir imaginé la poudre, vu les
étincelles, senti la chaleur, toutes les fois califourchon, probablement même un
drapeau. à quoi bon. et la mer, cette mer jamais vue, cette plage si peu foulée,
ces brise-lames. ce bois sombre et dressé, ces cabines, ces souvenirs qui ne
sont pas miens et n’influencent pas, ne peuvent influencer mon rapport à ce
lieu, tout au plus me permettent-ils d’être : là.